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La vidéosurveillance se cherche un alibi
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Dans le Monde Diplo une analyse critique du « Rapport complémentaire sur l’efficacité de la vidéoprotection » pour le ministère de l’intérieur (août 2011).
En juillet 2009, le gouvernement avait cru bon d’habiller sa politique d’installation de caméras de vidéosurveillance de voie publique d’une étude dont la méthodologie grotesque s’était aussitôt attirée de sévères critiques. L’œuvre de trois corps d’inspection dépendant du ministère de l’intérieur (Inspection générale de l’administration [IGA], Inspection générale de la police nationale [IGPN], Inspection générale de la gendarmerie nationale [IGGN]), ce travail continue de servir d’alibi scientifique au gouvernement, notamment auprès des autorités locales qu’il souhaite convaincre des avantages de l’installation de caméras.
En août 2011, sans doute inquiètes que les manquements de leur enquête au plus élémentaire bon sens scientifique ne finissent par trop se voir, les trois inspections responsables ont récidivé en publiant « une actualisation et un approfondissement » du premier rapport qui « revient en introduction sur les critiques méthodologiques dont le rapport 2009 avait été l’objet ». En effet, « plusieurs d’entre elles paraissent recevables » à la nouvelle mission d’étude, qui « s’efforce de les prendre en considération ».
Les critiques qui « mettent en cause l’indépendance des auteurs du rapport » sont en revanche jugées « inacceptables ». Pourtant, s’il n’est pas inutile de rappeler qu’il s’agit de fonctionnaires de l’intérieur évaluant une politique de ce même ministère, la meilleure preuve de la servilité des enquêteurs réside précisément dans les manquements méthodologiques qu’ils avouent à demi-mot. Seuls des chercheurs aux ordres oseraient présenter au public une « étude » aux écueils aussi flagrants. Pour le dire autrement : une méthode défaillante suppose soit de ne pas conclure, soit de se donner la conclusion d’avance, puisque l’étude elle-même ne peut livrer aucun résultat. Rien ne sert donc de pousser des cris d’orfraie. La meilleure (et la seule) preuve d’« indépendance » qui soit recevable est évidemment la mobilisation d’une méthodologie digne de ce nom.